Le Kintsugi, ou l’art de sublimer les cassures
L’art du kintsugi est une tradition de réparation ancrée dans les cultures chinoise, coréenne, japonaise et vietnamienne. Cependant, c’est au Japon que cette pratique a atteint des sommets esthétiques en intégrant de la poudre d’or aux laques issues de résines de plantes. Cette philosophie va bien au-delà de la simple réparation, elle considère le passé de l’objet, son histoire, et même les accidents qu’il a pu traverser. La casse d’une céramique n’est pas une fin en soi mais plutôt un renouveau, le début d’un autre cycle et une continuité dans son utilisation. L’idée n’est pas de dissimuler les réparations, mais de les mettre en évidence.
Le kintsugi est lié à la cérémonie japonaise du thé et a gagné le cœur des collectionneurs, au point que certains ont été accusés d’avoir délibérément endommagé des poteries précieuses pour qu’elles puissent être restaurées avec les coutures d’or du kintsugi. La technique elle-même est un art méticuleux. La laque est pétrie avec de la farine de blé et de l’eau, puis appliquée pour renforcer l’assemblage des morceaux. Un mélange épais est placé entre les tessons, et lorsqu’il sèche, des crevasses apparaissent. Ces fissures sont comblées par un mélange dilué appelé “kokuso urushi 刻苧漆”, composé de grains de riz, de fibre de ramie et de poudre de bois.
Le kintsugi ne se limite pas à l’utilisation de l’or ; il peut également être réalisé avec de l’argent, appelé “gintsugi” 銀継ぎ ou simplement avec de la laque, nommé “urushi tsugi” 漆継ぎ.
L’art du kintsugi apparaît comme une métaphore de la résilience, reflétant la capacité à trouver la beauté dans les imperfections. S’inscrivant dans la pensée japonaise du wabi-sabi, le kintsugi est une révérence à la beauté qui émerge des expériences qui ont laissé des cicatrices, rappelant que chaque brisure peut être une œuvre d’art en soi.